Une carotte mixée qui ressemble à une carotte, une tomate elle aussi mixée mais dont les tranches sont dressées sur une assiette comme si elles venaient d’être coupées, un bœuf bourguignon également mixé qui a tout l’air d’un bourguignon… bienvenue dans le monde des plats à texture modifiée. Un travail délicat que les agents des cuisines du centre hospitalier et de l’Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Éphad) du Champ-Nadot commencent à mettre en œuvre. Le but? Donner aux aliments mixés l’aspect des aliments d’origine pour rendre aux résidents l’envie de manger. « Certaines personnes ont du mal à manger parce qu’elles ont du mal à mâcher, elles sont donc parfois dénutries explique la directrice du centre hospitalier, Fatiha Zidane. Les substituts de repas sont rarement bons. L’objectif est d’avoir la même quantité de repas pour les personnes ayant besoin d’aliments mixés. » L’idée a donc été de former des cuisiniers à un nouveau genre de cuisine qui permet de reconstituer sous forme gélifiée des plats, des gâteaux… « Avec cette méthode, il n’y a pas de dénaturation du goût des aliments » continue la directrice.
Les cuisiniers travaillent des produits frais et surgelés, mixent ces aliments avec des robots qui permettent d’obtenir des mixés dont la granulométrie est proche de zéro puis reconstituent l’aliment et jouent sur l’esthétique, les couleurs, la forme. « Nous avons des moules spéciaux et des emporte-pièces pour reconstituer les aliments », détaille Cyrille Loiseau, responsable des cuisines centrales et de l’Éhpad. Par exemple, pour reconstituer une salade de tomates, nous coulons l’aliment mixé dans une plaque et, à l’emporte-pièce, nous reconstituions les tranches. Quand les aliments sont simplement mixés, les résidents ont du mal à reconnaître ce qu’ils mangent. » Dans les établissements du centre hospitalier, 170 personnes ont besoin de repas mixés. « Nous allons définir un programme pour remplacer les mixés par des plats à texture modifiée, indique Cyrille Loiseau. Nous allons commencer par les entrées. Dans le courant de l’année 2017, les trois quarts des repas seront reconstitués pour les personnes qui en ont besoin. Nous devons acquérir du matériel. Cela représente beaucoup de travail mais aussi beaucoup de plaisir. Il y a une nouvelle dynamique en cuisine. Nous participons à une meilleure prise en charge nutritionnelle. » Pour Hélène Gounaud, directrice adjointe du centre hospitalier, les repas à texture modifiée permettront aussi de travailler sur l’aspect social et psychologique : « Nous pourrons redonner une fourchette et un couteau aux personnes qui mangent mixé et qui n’avaient plus besoin que d’une cuillère. Ils mangeront comme tous les autres résidents car, parfois, les personnes qui mangent mixé s’isolent. » Formés par la société SENES, spécialisée dans la nutrition des personnes âgées et l’innovation, les cuisiniers et Stéphane Ribière, directeur du pôle formation de cette société, ont organisé un buffet de bouchées et autres tartes à texture modifiée afin de présenter cette nouvelle manière de cuisiner aux personnels ainsi qu’aux membres du conseil d’administration. Et le résultat est effectivement bluffant !
Stéphanie Payssan, l’Echo du Berry, avril-mai 16